COMPTE RENDU FINAL DE LA CINQUIEME RENCONTRE REGIONALE DES DIRECTEURS NATIONAUX DES OPM
DE L’AFRIQUE FRANCOPHONE
(Bujumbura, du 03 au 08 février 2009)
Du 03 au 08 février 2009, a eu lieu au centre de spiritualité Mont Sion de Bujumbura au Burundi de la cinquième la rencontre régionale des Directeurs nationaux des Œuvres Pontificales Missionnaires de l’Afrique francophone. Cette réunion a rassemblé vingt quatre participants : évêques, prêtres, religieux et religieuses, laïcs de douze pays de l’Afrique francophone autour du thème : « ETRE MISSIONNAIRE DANS UNE AFRIQUE MARQUEE PAR DES CONFLITS ».
En effet, au cours de l’Assemblée Générale du Conseil Supérieur des OPM de mai 2008 à Rome, les Directeurs nationaux avaient ressenti au plus profond de leur cœur le souci de paix dans une Afrique déchirée par divers conflits. Ce thème nous ouvre l’esprit sur nos propres lacunes car notre continent est caractérisé par les problèmes divers : les maladies, sécheresses, famines, divisions, conflits ethniques, guerres, sous-développement,…. Ces problèmes divers qui paralysent le continent concernent aussi l’Eglise de Jésus christ en Afrique.
Si, proclamer l’Evangile du Royaume de Dieu (Lc 4,43) au monde entier , telle est la mission de l’Eglise , l’Eglise est appelée à familiariser les nombreux africains avec l’Evangile et de s’y familiariser elle aussi. Comme disait le Père Nathanaël SOEDE : »L’Afrique ne doit pas, face à ce phénomène, perdre de vue qu’un peuple en souffrance ne grandit que lorsqu’il est capable de se dire, sans complaisance, la vérité sur elle –même et sur son histoire dans son rapport avec les autres, en sortant du champ de l’auto-flagellation et de l’accusation irresponsable des peuples étrangers ». Comment, aujourd’hui, l’Eglise peut-elle aider à opérer des changements pour une Afrique complice de sa propre destruction ?
A Kampala en 1969, le Pape Paul VI annonçait de manière prophétique : « Vous, africains, vous êtes désormais vos propres missionnaires ». Ce vibrant appel nous invite, nous directeurs nationaux et diocésains, à prendre une part active dans la proclamation de l’Evangile en terre africaine marquée par les conflits et dans l’édification d’une Eglise vivante, capable de rejoindre les hommes au cœur de leur vie familiale, sociale, économique et politique. Telle est la pertinence du sujet sur lequel nous avons réfléchi au cours de nos travaux.
Plusieurs communications ont meublé nos échanges : celles des directeurs nationaux du Burundi, du Rwanda, de Madagascar, de la République Centrafricaine et du Sénégal-Mauritanie.
Le Directeur National des O.P.M du Burundi nous a, avant tout, rappelés qu´après plusieurs décennies de crises répétitives, les populations sont plus que fatiguées. Elles aspirent toutes à une paix durable. Plusieurs expériences en rapport avec l’engagement d’un bon nombre de chrétiens révèlent que la corde ethnique longtemps caressée s’avère être un alibi, une échappatoire qui cache un autre mal plus fondamental : l’égoïsme des dirigeants qui les aveugle dans la gestion du pouvoir. Face à ces défis, l’évangélisation demeure nécessaire voire incontournable : l’Eglise doit rendre visible l’Esprit du Christ en prêchant par une vie de témoignage d’amour. L’Eglise du Burundi doit prêcher la conversion des cœurs et redoubler d’efforts surtout dans l’éducation chrétienne des enfants et des jeunes qui sont l’avenir du pays et la force de l’Église.
Prenant à son tour la parole, le Directeur national des O.P.M du Rwanda nous a rappelés les différentes crises qui ont secoué le pays. Durant ces crises, l’Église est restée auprès du peuple pour faire siennes ses blessures, ses souffrances et ses angoisses grâce à la proximité de « caritas nationalis ». Malgré les critiques acerbes lancées à l’encontre de l’Eglise, celle-ci n’a pas ménagé ses efforts pour aider le peuple rwandais à sortir de la crise. C’est pourquoi, après le génocide, elle s’est attelée à la pastorale de reconstruction du pays sous divers volets tout en focalisant son action sur la pastorale de la promotion de la réconciliation et de l’unité en synergie avec les institutions civiles.
Après nous avoir expliqué les causes des crises qui paralysent actuellement le Madagascar, le Directeur national des O.P.M de ce pays a montré l’action de l’Église qui a consisté à dénoncer les injustices et toutes les atteintes à la dignité de la personne humaine. Dans le même temps elle est restée proche des pauvres à travers ses services sociaux caritatifs.
Le Représentant des OPM/R.C.A a concentré son attention sur l’expérience d’engagement des Mouvements des Femmes Croyantes pour l’unité et la paix en Centrafrique. Cette association est née comme une tentative de solution à la dérive qu’a connue le pays suite à plusieurs mutineries. Sa nature est apolitique et son objectif est essentiellement d’ordre spirituel et moral.
Par le biais de plusieurs messages d’interpellation, ce mouvement s’est engagé à parler haut et fort pour aider à une prise de conscience sur la gravité des conséquences de la crise. Le mouvement s’implique courageusement aussi dans la politique et toutes les actions de nature à promouvoir la paix.
Le Sénégal a connu une bonne et longue période de paix depuis l’indépendance pacifiquement acquise. Néanmoins, il faut reconnaître que des nuages ont assombri le ciel des relations du peuple sénégalais ; le prouvent si bien la rébellion de Casamance, les émeutes de Kédougou. L’Eglise a été présente pour aider le peuple à défendre ses droits. L’épiscopat a régulièrement mais prudemment dénoncé les problèmes tout en proposant des voies de sortie. L’atout dont dispose aujourd’hui l’Eglise au Sénégal est son soutien, son écoute et sa sympathie de la part de la population. Pour elle, c’est un devoir incontournable d’éclairer et d’illuminer le peuple au nom de Dieu. Une autre force de l’Eglise au Sénégal est sa proximité sans discrimination auprès de toutes les catégories vulnérables.
Dans une analyse profonde et de haute portée théologique, le frère Emmanuel NTAKARUTIMANA nous a aidés à mieux comprendre les enjeux du thème débattu durante notre rencontre. Après avoir fait une typologie des différentes guerres en Afrique et relevé les traumatismes causés dans les consciences, l’orateur a aussi constaté que malgré ces conflits, le nombre des chrétiens croît de jour en jour. Pour une pastorale d’ensemble plus efficace, il importe qu’il y ait une synergie entre les différentes commissions et structures qui œuvrent pour la justice et la paix dans le monde. Pour ce faire, les Œuvres Pontificales Missionnaires auront pour mission spécifique d’intensifier la connaissance de la Parole de Dieu dans le travail de réconciliation et de reconstruction nationale. Elles doivent aider les fidèles à opérer une conversion du cœur pour une nouvelle aventure avec le Christ ressuscité et pour un voyage vers une nouvelle identité. Dans la même ligne, il faudra développer une spiritualité centrée sur l’Eucharistie car « c’est autour de l’Eucharistie qu’il s’agira de construire une nouvelle famille ».
Pour être missionnaire dans notre Afrique marquée par les guerres, il importe aussi de créer des centres de formation, d’intégration sociale, de récupération. Les différentes visites sur le terrain, dans les diocèses de Bujumbura et de Gitega, nous ont fait toucher du doigt l’importance et les fruits de cette action pastorale axée sur la doctrine sociale de l’Eglise.
A la suite de ces divers exposés et expériences, nous faisons les recommandations et prenons les résolutions qui suivent :
RECOMMANDATIONS
Vu que les OPM sont appelées à être un instrument d’animation de l’Eglise-missionnaire, Nous, directeurs nationaux des OPM de l’Afrique Francophone estimons que des orientations ci-après sont nécessaires pour insuffler, aux Eglises d’Afrique et de Madagascar de marquées par des conflits, un esprit de réconciliation et de paix.
- Faire connaître les OPM à toutes les composantes de la communauté chrétienne : les prêtres, les religieux(ses), les adultes, les jeunes et les enfants
- Former la conscience missionnaire des catégories de personnes sus-mentionnées.
- Encourager tout geste de réconciliation et de Pardon
- Collaborer avec les autres agents de la pastorale
RESOLUTIONS
- Mettre en place une équipe élargie en vue de la réconciliation
- Former les directeurs des OPM et les autres agents pastoraux sur les thèmes de la justice, de la paix et de la réconciliation
- Inviter les conférences épiscopales de nos pays à prévenir les conflits latents
- Favoriser la communication des activités au niveau des régions de l’Afrique Francophone (CEDEAO et Afrique Centrale).
- Prévoir des moyens humains et matériels pour l’exécution du programme
- Evaluer en temps raisonnable l’exécution du programme
Nous ne saurions terminer ce compte rendu sans remercier le légat pontifical, les pasteurs de l’Eglise du Burundi, le Secrétaire de l’Œuvre Pontificale de Saint Pierre Apôtre, les directeurs nationaux et diocésains des O.P.M, les participants et intervenants à cette rencontre, les agents pastoraux, tous les fidèles laïcs et clercs de l’Eglise locale de Bujumbura.
Puisse le Seigneur bénir leurs efforts et actions d’annonce de Jésus-Christ, missionnaire par excellence.
Fait à Bujumbura, le 08 février 2009
Le Secrétariat